Abstract | Bibliography | Notes

Serendipity.

Le Nouveau Monde c’est l’Europe.

Rappel pour ceux qui auraient raté certains épisodes.

Image1C’est donc finalement un ancien vice-président du National Intelligence Council de la Cia qui aura lâché le morceau : le Nouveau Monde c’est l’Europe. Et tout compte fait, c’est peut-être mieux que l’argumentation vienne des États-Unis plutôt que ce ne soit un Européen qui le rappelle.

Graham E. Fuller, analyste pour la Rand Corporation à Washington D.C., est bien connu de ceux qui suivent les revues anglophones de relations internationales. Depuis le milieu des années 1990 il a publié plusieurs articles et ouvrages particulièrement intéressants. Entre autres, avec Ian Lesser dans Foreign Affairs (mai-juin 1997), « Persian Gulf Myths » ; et un article dans le Los Angeles Times du 24 août 1998 où il pointait déjà le danger d’une politique de lutte uniquement militaire contre le terrorisme à la suite des attentats au Kenya et en Tanzanie :

« It is dangerous to divorce terrorism from politics, yet the U.S. media continue to talk about an abstract war against terrorism without mention of the issues or context that lie behind them ».

Surtout il va publier en avril ou mai 2003 un ouvrage intitulé The future of Political Islam (Palgrave Macmillan) où il défend l’idée que « dans le contexte du 11 septembre […] il est facile de croire que l’Islam et les musulmans sont les ennemis de l’Occident. Mais ceci est faux […]. Se focaliser sur le fondamentalisme et l’extrémisme islamiste nous rend aveugle à une autre tendance de fond : un Islam politique libéral » (quatrième de couverture du livre à paraître).

Le Monde daté du 14 février 2003 publie un article intitulé « “Vieille Europe” ou vieille Amérique » où Graham Fuller rappelle ce qui est devenu tellement évident en Europe qu’on fini parfois par l’oublier.

« Rumsfeld a-t-il raison ? Qui […] représente vraiment la “vieille façon de penser” ? La thèse avançant que c’est en réalité l’Amérique qui représente les “vieilles valeurs”, et non la France et l’Allemagne, pourrait être mieux fondée […]. Ces deux puissances européennes ont tourné la page sur cinq siècles de guerre, deux guerres mondiales dévastatrices, afin de former une nouvelle union, avec une monnaie commune et le désir partagé de former une large politique commune. Franchir un tel pas représente une révolution pour de très vieux États-nations rivaux, dotés de cultures fort différentes.
Mais les choses ne s’arrêtent pas là. Cette union européenne est une expérience remarquable — la première fois dans l’histoire que des États auront volontairement abandonné de vrais pans de leur propre souveraineté nationale pour participer à de nouveau projet de civilisation […]. Les préalables actuellement requis sont que les États membres doivent être authentiquement démocratiques, qu’ils doivent protéger les droits de l’homme et les libertés civiles et qu’un recours à la guerre entre membres de l’Union est exclu. Ces États se voient comme une communauté en expansion progressive, gagnant de nouveaux membres et se développant géographiquement — mais uniquement après qu’ont été réunis des critères très stricts. Ils aspirent à constituer une nouvelle force dans le monde, et sont en vérité en train d’y parvenir. C’est la première fois que nous assistons à l’émergence d’un « empire » bâti sur le consensus et le désir commun plutôt que sur le pouvoir et la conquête. Voilà qui ne ressemble guère à la “vieille Europe”.

En fait, c’est l’Amérique qui incarne réellement le “vieux monde”. Il s’agit là d’un constat et pas d’une remarque désobligeante. L’Amérique se considère aujourd’hui comme le gentil chef — ou le gendarme — du monde qui sapera n’importe lequel et chacun des efforts de rivaux potentiels ou chefs régionaux, amis ou pas, pour faire de l’ombre à la puissance écrasante des États-Unis. Certes, cette pax americana peut avoir de nombreux aspects positifs, et aussi négatifs, mais son fondement sur une monopolisation du pouvoir plutôt que sur le consensus rend la qualification de “nouveau monde” un peu hasardeuse. La puissance, pas la loi internationale, est bien la véritable base du “vieux pouvoir” et de l’ “ordre ancien”, depuis la nuit des temps. »

Accès direct à l’article de Graham E. Fuller dans Le Monde du 14 février 2003 ; un long article qui contient encore de nombreux éléments passionnants de réflexion sur l’Europe comme nouveau monde. Disponible en ligne quelques jours encore avant le basculement dans les Archives payantes.

Dans Le Monde également, sur un sujet proche, on peut lire le compte rendu de Jean Birnbaum sur le livre de Jacques Derrida, Voyous. Deux essais sur la raison, édition Galilée, 240 p., 30 euros.

La page d’accueil du journal Le Monde

Abstract

C’est donc finalement un ancien vice-président du National Intelligence Council de la Cia qui aura lâché le morceau : le Nouveau Monde c’est l’Europe. Et tout compte fait, c’est peut-être mieux que l’argumentation vienne des États-Unis plutôt que ce ne soit un Européen qui le rappelle.Graham E. Fuller, analyste pour la Rand Corporation à Washington ...

Bibliography

Notes

Authors

Partnership

Serendipity.

This page as PDF