Abstract | Bibliography | Notes

Serendipity.

Gender in research: evaluation and the production of knowledge.

En France, l’enseignement supérieur et la recherche sont toujours marqués par un déséquilibre entre les femmes et les hommes dans des proportions proches de celles constatées au niveau européen. La structure genrée de nos sociétés se décline à tous les niveaux de l’organisation sociale et le système académique n’y échappe pas. Le constat général est que la part des femmes diminue au fur et à mesure que l’on s’élève dans la hiérarchie des postes académiques. Ce phénomène s’explique par la persistance de stéréotypes, par l’invisibilisation du travail des femmes dans le domaine scientifique, par l’entre-soi des réseaux très masculins, par une conciliation vie professionnelle/vie privée plus complexe pour les femmes, le travail domestique pesant davantage sur elles que sur les hommes. En France comme dans d’autres pays, différents champs de recherche autour de la question du genre se sont particulièrement développés avec comme visée la déconstruction des conceptions et des idées reçues qui fondent les identités « masculines » et « féminines », des rôles sociaux que doivent tenir les femmes et les hommes et qui légitiment ainsi une domination des hommes sur les femmes, justifiée par un indépassable déterminisme biologique et psychologique (Löwy et Marry, 2007)

L’évaluation de la recherche et de ses protagonistes peut, elle aussi, être orientée par les stéréotypes de genre entraînant des biais générateurs de discriminations et d’inégalités.

Les biais potentiels de genre dans l’évaluation s’inscrivent dans le cadre plus général de la structure même de notre système social et constitue de ce fait une problématique très complexe.

Contribuer à faire évoluer les pratiques pour réduire les biais de genre ne doit toutefois pas être une démarche circonscrite à l’évaluation mais s’étendre également à la production des savoirs. Il s’agit ainsi d’amener progressivement les scientifiques à considérer systématiquement la dimension sexe et/ou genre dans les recherches qu’elles ou ils conduisent et ce quel que soit leur domaine.

Axe 1 : les biais de genre dans l’évaluation

Des études (notamment Wenneras and Wold, 1997, Régner et al, 2019) montrent l’existence des biais de genre dans les processus d’évaluation que ce soit pour les recrutements, les promotions ou les attributions de financement et ce quels que soient les domaines scientifiques. Manifestation de la division genrée du monde académique, ces biais ont pour effet de perpétuer et de renforcer les inégalités entre les femmes et les hommes.

Si la formation et la sensibilisation constituent des leviers déterminants pour lutter contre les biais de genre, elles ne sont pas des conditions suffisantes. En effet, identifier et mesurer systématiquement les potentiels biais de genre dans les processus d’évaluation ainsi que les processus conduisant à leur expression reste nécessaire. Face à la complexité des phénomènes pouvant conduire à une évaluation inégalitaire ou discriminante, se pose la question des approches et des outils méthodologiques.

Axe 2 : les biais de genre et la production des savoirs

 Le sexe et le genre sont des variables séparées qui s’articulent dans un processus d’« embodiment » décrivant l’articulation complexe entre sexe biologique et environnement social (Fausto-Sterling, 2012). Si les différences biologiques liées au sexe autres que celles relatives à la reproduction sont aujourd’hui bien connues, la majorité du monde de la recherche, en dehors des sciences sociales, reste encore réticente voir sceptique quant à l’utilisation du concept de genre (N. Mathevon et E. Viennot, 2017) comme « outil heuristique » (Marry, 2011) et méthodologique alors même que des recommandations visant à prendre en compte la dimension de genre et / ou de sexe en recherche se sont multipliées depuis les années 60.

Les différences entre les femmes et les hommes sont encore très souvent essentialisées, perpétuant ainsi une (re)production des rapports sociaux de sexe justifiés par une distinction « naturelle » entre les femmes et les hommes et introduisant des biais « idéologiques » dans la production des savoirs (ibid, 2017). Toutefois, ces différences ne peuvent être réduites à une simple dichotomie entre mâle et femelle mais doivent être considérées comme une intrication complexe entre sexe et genre (Springer, 2012). L’utilisation du genre comme outil méthodologique et interdisciplinaire permet de contrer les biais idéologiques et d’enrichir la recherche grâce à la confrontation de différents univers scientifiques.

Pourquoi et comment amener les communautés scientifiques à considérer la dimension sexe et/ou genre dans les recherches qu’elles ou ils conduisent et à s’emparer du concept de genre comme « catégorie utile » (Marry, 2011) ? Quels sont les impacts potentiels si elles ou ils ne le font pas ? Par ailleurs, il convient aussi de s’interroger et d’analyser les points de résistances ainsi que les écueils potentiels.

http://genderedinnovations.stanford.edu/policy/timeline.html

Programme

09h00 Accueil des participants

09h30 Ouverture

  • Thierry Damerval, Président-Directeur Général, ANR
  • Elisabeth Claverie,Directrice Générale Déléguée à la Recherche et à la Stratégie, CIRAD

09h40 Introduction

  • Laurence Guyard, Référente égalité ANR, Les enjeux de genre pour une agence de financement
  • Magalie Jannoyer, adjointe à la directrice générale déléguée à la recherche et à la stratégie du CIRAD, Présentation du projet GenderSmart

Axe 1 : Les biais de genre dans l’évaluation

10h00  Introduction

  • Pierre Bataille, “Inégalités de genre et carrières académiques: les apports des comparaisons internationales”, Université de Lausanne

10h20  Les inégalités dans les carrières académiques

  • Delphine Martinot, « Pourquoi la meilleure réussite scolaire des filles ne se traduit-elle pas par une meilleure représentation des femmes dans les disciplines universitaires et les carrières socialement prestigieuses ? », projet ANR GENIM

10h40   Pause

11h00  Identifier, mesurer les biais de genre dans l’évaluation

  • Patrick LLerena, « Evaluer les biais de genre dans l’allocation des financements de la recherche », projet ANR GIGA.
  • Pascal Huguet, LAPSCO, « Les jurys de concours porteurs de stéréotypes de genre à un niveau implicite promeuvent moins de femmes lorsqu’ils ne croient pas à l’existence de biais de genre »
  • Raphaël Beck, FRS, « Genre et évaluation de la recherche : analyse d’une agence de financement »

12h00 Table ronde

animée par Pierre Bataille

  • Intervenants de la matinée
  • Président de comité d’évaluation scientifique ANR
  • Présidente de comité d’évaluation scientifique ANR

13h00  Pause déjeuner

Axe 2 : les biais de genre et la production des savoirs

14h00   Introduction Christine Verschuur, anthropologue et sociologue spécialiste du Genre, IHEID, université de Genève

14h20  De l’intérêt de prendre en compte la dimension sexe et/ou genre en recherche

  • Emmanuelle Bouquet, « Remettre du genre dans les ménages agricoles : retours d’expérience d’un projet de recherche sur les liens entre agriculture et alimentation au Burkina Faso », CIRAD.
  • Eglantine Fauvelle, « Retour d’expériences du projet RTBfoods,Breeding Root, Tuber and Banana Products for End User Preferences», CIRAD

15h00  Pause

15h30  En tenir compte : écueils et résistances

  • Aitana Perea-Gomez, « Régulation de la détermination du sexe et de la différenciation ovarienne : implication dans les troubles du développement sexuel », projet ANR SexDiff
  • Michal Raz,EHESS, « Les transformations des savoirs et des pratiques biomédicales autour de l’intersexuation en France »
  • Virginie Bonnot,« Comprendre la résistance à l’égalité de genre: effets de “backlash” et idéologies de justification du système », projet ANR URGEN

16h30   Table ronde animée par Christine Veerschuur

  • Intervenants de l’après-midi
  • Présidente de comité d’évaluation scientifique ANR
  • Président de comité d’évaluation scientifique ANR

17h30 Conclusion MESRI (à confirmer)*

Modalités de participation

INSCRIPTION

Venez à notre rencontre : en présentiel, dans le respect des règles sanitaires, à la Maison de la RATP, Paris. Suivez l’intégralité du colloque en direct sur notre plateforme digitale et interactive.

Pour toute information : colloquegenre@agencerecherche.fr

Intervenants et intervenantes.

Pierre Bataille : 

Pierre Bataille est sociologue, Maître de conférences en sciences de l’éducation à l’Université Grenoble-Alpes et membre du Laboratoire sur les apprentissages en contexte (LaRAC). Après une thèse sur les parcours de vies des élèves des grandes écoles françaises soutenue à l’Université de Lausanne en 2014, il a travaillé par la suite sur le poids du genre sur les parcours des jeunes chercheurs en Europe – avec un focus sur la Suisse. Il a par ailleurs mené des travaux sur l’analyse des carrières artistiques dans une perspective de comparaison internationale et sur la mobilité sociale des diplômés en France.

Delphine Martinot :

Delphine Martinot est Professeure des Universités en psychologie sociale à l’université Clermont Auvergne depuis 2006. Elle est membre du Laboratoire de Psychologie Sociale et Cognitive (LAPSCO), UMR CNRS 6024. Au sein de ce laboratoire, elle a été responsable de l’équipe « Régulation sociale de la cognition et des comportements » de 2008 à 2012, puis co-responsable de l’équipe « Comportements Sociaux et Dynamiques Collectives » de 2012 à 2020. L’axe central de ses activités de recherche vise à comprendre comment la stigmatisation sociale et les inégalités de statut entre les groupes, notamment entre les femmes et les hommes, régulent les processus cognitifs, affectifs, les comportements et les performances, en particulier dans le domaine scolaire. Elle a ainsi été responsable scientifique de l’ANR-11-INEG-002 GENIM sur le « Maintien des inégalités de genre: processus psychologiques et sociaux légitimateurs ». Elle est actuellement responsable scientifique de l’ANR-18-CE28-0004-01 DISESTEEM sur le « Désengagement psychologique et estime de soi : un cycle infernal de décrochage scolaire ? ».

Pascal Huguet : 

Directeur de Recherche au CNRS, directeur du Laboratoire de Psychologie Sociale et Cognitive (LAPSCO-UMR 6024 CNRS & Université Clermont Auvergne), membre du Conseil Scientifique de l’Éducation Nationale.

Spécialiste de la régulation sociale des fonctionnements cognitifs (interactions cognition/environnement), Pascal Huguet a dirigé la Fédération de Recherche 3C (Comportement-Cerveau-Cognition) d’Aix-Marseille Université en partenariat avec l’Institut National des Sciences Biologiques (INSB) du CNRS. Ses travaux en laboratoire ou en site naturel (en particulier scolaire) ont mis en évidence l’influence des contextes et facteurs psychosociaux (présence des pairs, comparaisons sociales, catégorisations et évaluations de soi, stéréotypes de genre ou liés au vieillissement) dans les mécanismes de l’attention et de la mémoire. Nominé par la « Society for Experimental Social Psychology » (SESP) et l’«American Psychological Association (APS)» pour « contributions remarquables et soutenues aux sciences psychologiques”, il est aussi membre ou ex-membre du Comité National de la Recherche Scientifique (CoNRS), de l’Institut Thématique Multi-Organismes (ITMO) neurosciences, sciences cognitives, neurologie et psychiatrie, du comité exécutif de l’International Union of Psychological Science, et a par ailleurs travaillé pour la DG Recherche de la Commission Européenne sur l’égalité des sexes en sciences.

Raphael Beck : 

Docteur en sciences biomédicales et pharmaceutiques, ancien chercheur en sciences de la santé, je travaille depuis 2011 pour le Fonds de la Recherche Scientifique – FNRS qui est l’agence de financement de la recherche fondamentale en Belgique francophone. J’y dirige actuellement le service « Analyse, Evaluation & Prospective » qui est responsable entre autres choses de l’identification des experts amenés à intervenir dans le cadre des procédures d’évaluation que le Fonds organise, mais également du monitoring et de l’optimisation des dites procédures. Le service intègre également depuis 2018 l’Observatoire de la Recherche et des Carrières Scientifiques qui réalise des enquêtes auprès des chercheurs et anciens chercheurs ainsi que différentes études relatives à la carrière des chercheurs (insertion professionnelle, abandon du doctorat, etc).

Christine Verschuur : 

Anthropologue, docteur en socio-économie du développement de l’Université Paris I – Panthéon-Sorbonne (1983), Christine Verschuur est maîtresse de conférences à l’Institut de Hautes Etudes Internationales et du Développement de Genève, où elle dirige le programme Genre et Développement. Elle est également directrice des Cahiers Genre et Développement, édités par L’Harmattan-Paris depuis 2000. Associée à la faculté depuis 1996 au Graduate Institute (anciennement Institut des Etudes sur le Développement), elle a contribué à intégrer le genre dans les activités d’enseignement, dans la recherche et les actions de sensibilisation, et à accroître l’égalité entre les sexes dans l’établissement. Ses intérêts de recherche sont le genre et le développement; l’expertise en genre; l’économie solidaire et féministe; genre, organisations sociales urbaines et environnement; genre, développement rural et organisations paysannes; genre et migration.

Emmanuelle Bouquet :

Emmanuelle Bouquet est chercheuse au Cirad, où elle mène des travaux en économie du développement dans différents pays d’Amérique Latine, Afrique et Océan Indien. Elle étudie les conditions de participation des ménages agricoles sur les marchés du foncier, de la finance (crédit, épargne, assurance), du travail, et de la production agricole (avec un accent sur les arbitrages entre vente et autoconsommation). Ses travaux combinent approches qualitatives et quantitatives, et s’inscrivent dans un dialogue avec d’autres disciplines des sciences sociales, mais aussi de la nutrition. Depuis quelques années, elle s’intéresse à la dimension intra-ménage des pratiques et mécanismes de décision pour l’accès, le contrôle et l’allocation de différentes ressources : actifs productifs, actifs financiers, stocks agricoles et alimentaires, etc. Elle contribue depuis 2019 au projet Européen Gender-Smart, et co-anime une communauté de pratiques sur l’intégration du genre dans les recherches au Cirad

Aitana Perea-Gomez :

Aitana Perea-Gomez est chargée de recherche à l’Institut des Sciences Biologiques du CNRS. Ses travaux de recherche s’intéressent au développement embryonnaire des mammifères. Ses études actuelles à l’Institut de Biologie Valrose de Nice, portent sur les mécanismes moléculaires et cellulaires de la détermination du sexe et sur le développement normal et pathologique des gonades mâle et femelle au cours de l’embryogenèse.

Michal Raz : 

Michal Raz est docteure en sociologie, attachée de recherche et d’enseignement à l’EHESS. Ses travaux portent sur la manière dont les sciences biomédicales traitent et produisent le genre. Plus spécifiquement, sa thèse, soutenue en 2019 au sein du laboratoire Cermes3, retrace l’histoire de l’approche médicale à l’égard des individus intersexués en France depuis les années 1950. Elle est intitulée “La production des évidences sur l’intersexuation. Savoirs et pratiques médicales autour de l’hyperplasie congénitale des surrénales (France, 1950-2018)” et a gagné le prix de thèse du GIS genre en 2020.”

Virginie Bonnot :

 Maîtresse de conférences en psychologie sociale à l’Université de Paris (ex U. Paris Descartes) depuis 2007 et habilitée à diriger des recherches depuis 2019, Virginie Bonnot travaille notamment sur les idéologies de justification des inégalités de genre. Elle est actuellement coordinatrice scientifique du projet URGEN (2019-2023) « Understanding the resistance to gender equality: backlash effects and system-justifying ideologies » financé par l’ANR et qui implique des collègues de son laboratoire (Catherine Verniers, Cristina Aelenei et Silvia Krauth-Gruber), de l’Université Clermont Auvergne (Sandrine Redersdorff), de l’Université Sorbonne Nouvelle Paris 3 (Yvette Assilaméhou-Kunz), de l’Université Louvain la Neuve (Vincent Yzerbyt) et de NYU (John Jost). Elle est également coordinatrice des programmes d’échange internationaux à l’Institut de Psychologie de l’Université de Paris.

http://lps.recherche.parisdescartes.fr/membres-statutaires/bonnot-virginie-mc/

Comité d’organisation

  • Laurence Guyard, PhD sociologie, référente Genre et intégrité scientifique, ANR
  • Magalie Jannoyer, PhD agronomie, adjointe à la direction générale déléguée à la recherche et à la stratégie, CIRAD
  • Angela Zeller, Master sociologie, chargée de mission Genre, ANR

Références

 Anne Fausto-Sterling, 2012, Corps en tout genre, Paris, La Découverte

 Ilana Löwy & Catherine Marry, 2007, Pour en finir avec la domination masculine. De A à Z, Paris, Les Empêcheurs de penser en rond/Le Seuil.

 Catherine Marry, 2011, « Le genre passeur de frontières » in Les catégories sociales et leurs frontières, Degenne Alain, Marry Catherine, Moulin Stéphane (ss dir.), Presses de l’Université Laval (Québec), p. 161-191.

 Nicolas Mathevon & Éliane Viennot (dir.), 2017, La différence des sexes: questions scientifiques, pièges idéologiques, Paris, Belin.

 Isabelle Régner, Catherine Thinus-Blanc, Agnès Netter, Toni Schmader, & Pascal Huguet, 2019, “Committees with implicit biases promote fewer women when they do not believe gender bias exists”, Nature Human Behaviour, 26 août 2019.

 Springer K., Mager Stellman J. and Jordan-Young R., 2012, «Beyond a catalogue of differences: A theoretical frame and good practice guidelines for researching sex/gender in human health», Social Science & Medicine, 74, pp. 1817-1824.

 Christine Wennerås & Agnès Wold, 1997, A. Nepotism and sexism in peer-review, Nature, 387, pp341–343.

Abstract

En France, l’enseignement supérieur et la recherche sont toujours marqués par un déséquilibre entre les femmes et les hommes dans des proportions proches de celles constatées au niveau européen. La structure genrée de nos sociétés se décline à tous les niveaux de l’organisation sociale et le système académique n’y échappe pas. Le constat général est ...

Bibliography

Notes

Authors

Partnership

Serendipity.

This page as PDF