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Serendipity.

Se projeter, ensemble.

EspacesTemps.net, un devenir à construire.

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© Gabriel Orozco, Moon Axle, 2005, acrylic sur toile, Marian Goodman Gallery, New York, droits réservés (Image commentée[1] par Véronique Mauron, Historienne de l’art).

Les membres du Comité de rédaction et certains acteurs discutent très régulièrement du projet intellectuel et scientifique de la revue EspacesTemps.net. Cette question a notamment été débattue lors des différentes Estivales et Automnale de notre revue de 2005 à 2007. Les débats avec les acteurs ont souligné la nécessité de clarifier un certain nombre de positions portant sur les lignes éditoriale, disciplinaire, scientifique et politique de la revue. Pour franchir une nouvelle étape dans le développement d’EspacesTemps.net, l’ancrer dans l’évolution contemporaine des sciences sociales, maintenir une double exigence de scientificité et d’ouverture d’esprit, bref, se développer sans perdre l’esprit pionnier et défricheur d’EspacesTemps, faire le point sur l’identité de la revue devenait une opération nécessaire.

Puisque EspacesTemps.net se veut une revue en perpétuel dialogue avec ses lecteurs, nous avons décidé d’ouvrir la discussion sur l’organisation et sur les projets de la revue en vous présentant l’état de nos réflexions sous forme de questions ouvertes. Cet appel à proposition est accompagné des premières contributions, bientôt suivies, nous l’espérons, par les textes de tous ceux qui s’intéressent à l’avenir de la revue, et plus généralement aux rôles que peuvent tenir les sciences humaines et sociales dans la société. Nous invitons donc chacun, « Acteurs », auteurs et lecteurs à apporter sa contribution à cette traverse pour projeter ensemble EspacesTemps.net.

Une exigence de réflexivité scientifique et intellectuelle.

Une revue scientifique, une revue intellectuelle.

La force et la singularité de la revue viennent de son ambition d’être à la fois une revue scientifique de haut niveau, avec des articles évalués selon le principe du peer review (identifiés par un porc-épic[2]) et une revue intellectuelle critique, alteracadémique, ce dont témoignent déjà des rubriques telles que les « Mensuelles[3] », « Dans l’air[4] » ou « Interfaces[5] ». Cela implique que tous les articles, scientifiques ou non, soient compréhensibles pour un lecteur non spécialisé sur le sujet traité ou la discipline de l’auteur. Cette ambition exige, de la part des auteurs, un effort d’explicitation des postulats, des méthodes, des théories et des enjeux scientifiques ou académiques. Peut-on dire que la revue répond à cette double ambition ?

Une revue réflexive, un espace critique.

S’il est aisé de postuler l’exigence de réflexivité, il est plus difficile de la mettre en œuvre, notamment parce que cette notion implique des démarches très différentes en fonction des disciplines et des écoles de pensée. Le chercheur doit prendre en compte la réflexivité des acteurs sociaux dont ils étudient les productions, il doit également opérer un mouvement de réflexivité sur les enjeux qui animent sa recherche et les relations qu’il entretient avec son objet, il doit enfin savoir mesurer où et comment se situent ses travaux dans la production de connaissance du champ qui l’occupe. L’exigence de réflexivité nécessite donc une distanciation méthodologique vis-à-vis des acteurs, des constructions sociales, et de la posture de l’enquêteur, et une distanciation épistémologique vis-à-vis de sa discipline et/ou de son champ de recherche. EspacesTemps.net place la réflexivité épistémologique et méthodologique au cœur de son projet éditorial et scientifique. Mais la prise de recul n’empêche pas, bien au contraire, de poser la question de la finalité de la revue. A-t-elle pour fin la valorisation des connaissances et le débat intellectuel ? Peut-on participer de manière alternative à la réflexion sur la transformation de la recherche et de l’enseignement et à ses liens avec les institutions et le monde professionnel ? La revue peut-elle/doit-elle être reliée à un projet politique, citoyen, scientifique plus large ? Lequel ?

Pluridisciplinaire, et au-delà.

L’exigence pluridisciplinaire.

EspacesTemps.net constitue déjà une revue pluridisciplinaire, à plus d’un titre. D’abord, par l’ensemble des champs scientifiques représentés et publiés dans ses colonnes : sociologie, histoire, géographie, anthropologie, etc. Puis, du fait qu’un des critères actuels d’évaluation des articles soit précisément constitué par le caractère pluridisciplinaire des articles scientifiques proposés. Cette pluridisciplinarité s’exprime, de plus, dans la structuration même de la revue : les membres de ses comités, ses acteurs et ses auteurs viennent de disciplines différentes. Au sein de ces disciplines, ils appartiennent à des courants de pensées parfois présentés comme antagoniques ou inconciliables. Parce que nous partageons une exigence de rigueur et une perspective critique, nous pensons que la diversité de nos traditions épistémologiques n’est pas une faiblesse politique ou scientifique mais permet au contraire de confronter nos hypothèses et nos méthodes d’enquête. Comment ce choix est-il perçu par les lecteurs ? Vu de l’extérieur, la revue semble-t-elle relever plus particulièrement d’une discipline ou d’un courant de pensée ? Les thématiques soulevées sont-elles suffisamment diversifiées ? Lors de leurs recherches sur le site d’EspacesTemps.net, la discipline des auteurs influence-t-elle les choix des lecteurs ?

Construire une revue pluridisciplinaire n’est pas anodin, car ce projet se heurte à l’organisation de la recherche et à ses légitimités disciplinaires. Des questions « académiques » se posent alors. Comment référencer et faire évaluer la revue ? Comment intégrer les canaux de diffusion et de reconnaissance scientifiques sans renier notre exigence pluridisciplinaire ?

Une revue de Science Sociale ou une revue des Sciences Sociales ?

Espacestemps.net cherche à maintenir permanente l’exigence de tension entre l’observation et la théorisation, l’empirie et la théorie. La revue se donne pour projet et ambition l’élaboration de concepts et de théories du social transdisciplinaires, appuyés sur des enquêtes et susceptibles de penser la complexité du réel et la diversité des pratiques et des représentations humaines et sociales. Mais un débat reste vif au sein de la rédaction : doit-t-on mettre en avant une science sociale (privilégier l’unité de son objet : l’homme en société, et/ou l’unité du regard) ou, au contraire, des sciences sociales (favoriser la diversité des regards sur les sociétés, et/ou la diversité de ces sociétés). On peut aussi se demander si la ligne éditoriale de la revue doit consister à se référer à une théorie du social (social theory) unifiée ou, au contraire, se réclamer du pluralisme du débat sur ces constructions générales des phénomènes de société. De ce débat épistémologique ouvert dépend la ligne scientifique de la revue et sa position vis-à-vis des disciplines. EspaceTemps.net doit-elle être une revue pluri, inter, trans, post, ou in …disciplinaire ?

Les projets.

Déplacer les connaissances.

L’objectif d’EspacesTemps.net est également de susciter des rencontres et de publier les résultats de chercheurs qui tentent de penser la société à travers des objets transversaux et communs aux sciences humaines et sociales (Shs), mais aussi aux sciences en général, aux sciences de l’ingénieur, aux arts et à la philosophie. L’ambition d’EspacesTemps.net est de participer à l’invention d’un espace de dialogue situé hors d’un positionnement disciplinaire. Il s’agirait donc de travailler à situer la revue à l’interface des Shs, des autres savoirs scientifiques et techniques, des arts et de la philosophie. Comment construire cette interface, quelles places donner aux auteurs et aux lecteurs venus d’autres « horizons » ?

Sortir de sa langue.

Le passage au multilinguisme et à la republication d’articles de grande qualité constituent l’un des projets majeurs de la revue. L’objectif est de devenir une revue internationale avec des publications inédites et des republications, en langue anglaise pour le moment. Les articles inédits seraient désormais proposés et rédigés indifféremment en français ou en anglais, avec l’obligation de fournir un résumé long dans l’autre langue. Des textes rédigés dans d’autres langues sont possibles et souhaités, du moment qu’un « équivalent général » assure par ailleurs un niveau de communication convenable entre les textes. En ce qui concerne la republication, nous souhaitons nous appuyer sur un réseau d’acteurs-correspondants internationaux qui sélectionneront les articles qui paraissent les plus importants pour les sciences sociales et humaines. Ceux-ci seraient traduits en français ou en anglais. L’objectif à terme serait de parvenir à un taux de 50% de republication (francophone et autres) dans la rubrique « Textuel[6] ». Que peut apporter cette internationalisation ? Y a-t-il un risque de perte d’identité ? Comment la republication d’une sélection des articles qui renforcent le projet intellectuel de la revue et la pratique quotidienne du multilinguisme peuvent-ils contribuer à une mondialisation réussie de la revue ?

Élargir le cercle.

EspacesTemps.net est animé par le Comité de Rédaction et ses co-directeurs, les articles scientifiques sont évalués par le Comité Scientifique, comme dans toute revue scientifique. Mais la revue est aussi largement ouverte à ses « Acteurs », qui peuvent proposer des dossiers thématiques et de nouvelles rubriques, en plus des articles et des recensions. Leur participation active nous paraît indispensable pour penser l’évolution de la revue et ses transformations. La publication électronique permet de plus d’alimenter les débats par les réactions des lecteurs, réactions qui, argumentées, peuvent se transformer en articles. Que pensez-vous de cette organisation ? Quels rôles les acteurs peuvent ou doivent-ils jouer ? Comment imaginer une plus grande interaction entre auteurs et lecteurs, sans tomber dans les travers de forums brouillons et inconsistants ?

Travailler le medium.

EspacesTemps.net reste en accès libre et publie en flux continu. Ces deux spécificités nous démarquent de la majorité des revues, qu’elles soient sur papier ou en ligne. Ce choix est permis par le medium électronique dont nous voulons creuser toutes les possibilités, avec notamment l’insertion de vidéo, la rédaction d’articles wiki, ou en réseau, etc. Nous souhaiterions mettre en débat les rapports entre innovation scientifique et nouveaux médias, afin d’imaginer de nouvelles manières de faire et de valoriser la recherche. Quelles innovations scientifiques et techniques méritent d’être mises en œuvre pour faire vivre un projet comme le nôtre ? La revue comprend aujourd’hui plus de 850 articles et la recherche de contenus n’y est pas toujours aisée. Comment inventer une navigation plus efficace ? Nous souhaitons aussi que les lecteurs trouvent ce qu’ils n’ont pas cherché, ce qui implique de créer des liens et des associations entre les articles. Comment ? Que penser des outils existants de recherche aléatoire (Serendipity[7])?

Grandir et rester libre.

EspacesTemps.net fonctionne aujourd’hui grâce au partenariat avec l’École polytechnique fédérale de Lausanne (Epfl) : la faculté Enac, l’institut Inter et les laboratoires Chôros et Lasur financent les salaires des collaborateurs qui assurent le secrétariat de rédaction, la mise en ligne et le développement de la revue. Les co-directeurs d’EspaceTemps.net consacrent une (grande) partie de leur temps de chercheurs ou d’enseignants-chercheurs à la revue. Le développement de la revue, notamment son internationalisation, nécessite des fonds et du temps. La pérennité de la revue est également un enjeu. Le modèle économique le mieux à même de répondre à nos exigences de liberté intellectuelle et de gratuité reste sans doute à inventer.

© Gabriel Orozco, “Moon Axle” (2005, acrylic sur toile, Marian Goodman Gallery, New York, droits réservés) : commentaire de Véronique Mauron, historienne de l’art.

Le jeu, la combinatoire, l’agencement organisent une série de peintures réalisées en 2004 et 2005 par Gabriel Orozco. A partir de formes et de couleurs répétées, une configuration mi-aléatoire, mi-rationnelle se réalise. Arborescence, coexistence, juxtaposition, assemblage, manque, coïncident pour proposer une composition dont les frontières sont extensibles à l’infini et dont la profondeur aspire le regard et stimule l’imagination.

Gabriel Orozco est né au Mexique en 1962. Il est un artiste majeur aujourd’hui, travaillant avec la peinture, la sculpture, la vidéo, la photographie, l’installation. Il vit à New York.

Bibliographie succincte :

Catalogue, Gabriel Orozco, Museo Nacional de Arte Reina Sofia, Madrid, 2005.

Yve-Alain Bois et Benjamin Buchloh, Gabriel Orozco, Londres, Thames and Hudson, 2007.

Endnotes:
  1. Image commentée: #annexe
  2. porc-épic: https://www.espacestemps.net/document2212.html#articlesscnorme
  3. Mensuelles: https://www.espacestemps.net/sommaire35.html
  4. Dans l’air: https://www.espacestemps.net/sommaire49.html
  5. Interfaces: https://www.espacestemps.net/sommaire43.html
  6. Textuel: https://www.espacestemps.net/sommaire32.html
  7. Serendipity: https://www.espacestemps.net/document1797.html

Abstract

© Gabriel Orozco, Moon Axle, 2005, acrylic sur toile, Marian Goodman Gallery, New York, droits réservés (Image commentée[1] par Véronique Mauron, Historienne de l’art).Les membres du Comité de rédaction et certains acteurs discutent très régulièrement du projet intellectuel et scientifique de la revue EspacesTemps.net. Cette question a notamment été débattue lors des différentes Estivales et ...

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Notes

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Serendipity.

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