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« Questions pour un… géographe ! ».

Jean-François Deneux, Histoire de la pensée géographique, 2006.

Image1Imaginons une émission spéciale de « Questions pour un champion » consacrée aux étudiants en géographie. Les questions pleuvent : « Top, géographe et cosmographe, je suis né vers 100 et mort vers 180, je suis l’auteur de trois grandes œuvres, la Syntaxe Mathématique, la Tetrabible, la Géographie, je suis… je suis… ? » ; « Top, je suis né à Sainte-Foy-la-Grande, fils d’un pasteur protestant et d’une institutrice, j’ai suivi les cours de Ritter à Berlin. Exilé en Suisse après la Commune de Paris, j’écris la Nouvelle Géographie Universelle, je suis ensuite appelé à Bruxelles où je fonde la Nouvelle Université. J’écris L’Homme et la terre, je suis… je suis ? » ; « Et maintenant une question de rapidité : top, quel est le nom la revue fondée en 1891 par Paul Vidal de la Blache ? » ; « Top, je suis celui à qui l’on doit le renouveau de la géographie politique en France, avec mon livre La géographie, ça sert d’abord à faire la guerre, paru en 1976. J’ai également fondé la revue Hérodote… je suis… je suis ? », « Top, je suis une théorie selon laquelle tout fait observé résulte d’une ou de plusieurs causes, simultanées ou successives, je suis… je suis ? » ; « Nous cherchons un mot… top, terme de physique et de biologie désignant la stabilité, le maintien ou le prolongement d’un processus, je suis utilisé par certains géographes pour désigner les situations d’ordre ou les processus d’organisation, je suis… je suis ? ».

Si vous n’avez pas su répondre, c’est qu’il est temps pour vous de lire le livre de Jean-François Deneux, Histoire de la pensée géographique, manuel conçu pour les étudiants de géographie, mais que bien des enseignants pourraient consulter.

L’ouvrage est organisé en deux grandes parties : les savoirs et les savoir-faire. Six chapitres composent la première partie. Ils présentent de façon claire et synthétique les principales phases du développement et de l’évolution de la science géographique, de sa naissance à aujourd’hui. Ils sont organisés de façon chronologique, du « temps des découvertes et des espaces révélés » (chapitre 1) à la géographie face à la mondialisation (« Les territoires du monde », chapitre 6). La seconde partie comporte cinq dossiers de documents qui permettent de revenir sur les points forts dans l’évolution de la géographie, comme la carte de Cassini (dossier 1), les régions de Paul Vidal de la Blache (dossier 3) ou encore les cartes, modèles, chorèmes et schémas (dossier 5).

Les objectifs fixés par l’auteur dans l’introduction sont respectés : présentation synthétique de l’évolution de la pensée géographique, connaissances de base nécessaires à tout géographe, apprenti ou non, courtes biographies des plus grands géographes, tout y est.

Tout y est sauf une chose, la plus importante sans doute, la géographie d’aujourd’hui, trop rapidement évoquée dans la dernière partie du dernier chapitre (« Face à la mondialisation : une géographie des identités, une géographie post-moderne ? »). Neuf pages à peine d’où sont absents ceux qui font vraiment la géographie actuelle. Où sont les Lévy, Lussault, Paquot, Godard, Grataloup, Knafou, Rétaillé, Staszak, Stock, Cadène, Chivallon, Latour, Collignon, Debarbieux, Lazzarotti, Ascher, Berdoulay, Bassand, Kaufmann, Volvey ? Où est la « transedisciplinarité », c’est-à-dire l’interaction avec d’autres disciplines (philosophie, anthropologie, ethnologie, sociologie, art) qui est en train de changer radicalement le paradigme de la géographie ? Où sont les grandes questions de la géographie d’aujourd’hui, qui ne peut être résumée au simple binôme géographie et mondialisation ? Enfin, où sont les géographies anglo-saxonne, allemande ou encore italienne et espagnole d’aujourd’hui ? Certes, l’auteur précise dans l’introduction qu’il s’est « pour l’essentiel, limité à la France » (p. 5), mais comment comprendre l’évolution d’une science sans la considérer dans sa globalité ?

À quand une histoire de la géographie qui se décide enfin à « tuer le père », qui affirme haut et fort que non, la période vidalienne n’est pas « l’âge d’or de la géographie française » (p. 67) ? Cet âge d’or reste à venir (est-il même souhaitable qu’il vienne, tant il est synonyme d’inertie et de fossilisation de la pensée ?), il se construit par l’élaboration ininterrompue d’outils conceptuels novateurs nécessaires à la compréhension de la complexité de la Société-Monde.

PS : Si vous avez des doutes, les réponses aux questions sont : Ptolémée, Élisée Reclus, les Annales de Géographie, Yves Lacoste, le déterminisme, la néguentropie.

Jean-François Deneux, Histoire de la pensée géographique, Paris, Belin, 2006, 19 € 50.

Abstract

Imaginons une émission spéciale de « Questions pour un champion » consacrée aux étudiants en géographie. Les questions pleuvent : « Top, géographe et cosmographe, je suis né vers 100 et mort vers 180, je suis l’auteur de trois grandes œuvres, la Syntaxe Mathématique, la Tetrabible, la Géographie, je suis… je suis… ? » ; ...

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