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Et si l’accès au monde n’était qu’une affaire de capitaux ?

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Image1En signant l’ouvrage « Les classes sociales dans la mondialisation », Anne-Catherine Wagner montre une fois de plus sa grande capacité de synthèse. Résumer en une centaine de pages le débat autour de deux notions centrales des sciences sociales contemporaines n’était pas un pari gagné d’avance. L’ouvrage est bien rédigé, clair et concis, sans « sociologismes » inutiles. Il s’appuie sur des travaux anciens, dont certains classiques de la sociologie, tout en les réactualisant par de nouvelles références intéressantes. La bibliographie en trois langues (français, anglais et allemand) témoigne de l’ouverture intellectuelle de l’auteure et de sa maîtrise du champ de recherche international.

Le livre est structuré autour de cinq chapitres qui développent de manière spécifique et complémentaire la problématique centrale de l’ouvrage, à savoir les différences dans la capacité à tisser des liens transnationaux existant entre les élites et les classes populaires, les premières ayant plus de facilité à « jouer sur l’international » que les secondes. L’argumentation de l’auteure vise à montrer que cela tient en premier lieu à des raisons culturelles (parcours scolaires, maîtrise des langues, valorisation de la mobilité des classes dirigeantes et dévalorisation de la mobilité internationale des travailleurs, etc.) et non pas économiques.

La principale critique qui peut être adressée au livre est liée au flou conceptuel vis-à-vis des deux notions clés de l’ouvrage. La notion de classe est dans un premier temps introduite à partir de son acception économique, comme « un groupe d’individus partageant une même situation économique » (p. 23). Par la suite, à l’exception du deuxième chapitre, la classe est surtout abordée dans une perspective culturelle et symbolique, comme le partage de « privilèges liés à la considération sociale, […] fondés sur le mode de vie, le degré d’instruction, le prestige de la naissance ou de profession » (p. 39). Finalement, bien que pas complètement évacuée, la dimension économique des classes est reléguée au deuxième plan. Il devient ainsi difficile de comprendre quels sont les critères de différenciation auxquels l’auteure fait référence lorsqu’elle évoque les distinctions entre classes supérieures ou dominantes et classes populaires ou dominées.

Encore plus que pour la notion de classe, le sens donné au concept de mondialisation est laissé à la libre interprétation du lecteur, ce qui ne lui facilite pas la tâche. Dans la très grande majorité des cas, la notion est utilisée comme synonyme d’internationalisation, au point qu’il est légitime de se demander si son usage n’est pas lié à des exigences éditoriales plus qu’à un réel choix scientifique effectué pour décrire un ensemble de processus inédits méritant l’adoption d’un nouveau concept.

Hormis ces quelques faiblesses, l’ouvrage d’Anne-Catherine Wagner présente des thèses très intéressantes dont la principale consiste à montrer que l’internationalisation des rapports entre groupes bénéficie surtout aux acteurs bien dotés en capitaux sociaux et culturels. Ces derniers peuvent en effet accéder à l’espace social transnational beaucoup plus aisément que les groupes plus fortement enracinés dans un territoire donné et dont les ressources d’autochtonie tendent à être disqualifiées (pp. 75-76). À partir de l’observation de ces différences dans l’accès à l’espace international, l’auteure suggère d’adopter le concept de « rapport social à la mondialisation », une notion qui permet selon elle « de rompre avec une vision trop homogénéisante de la globalisation et d’appréhender plus finement le processus de mondialisation » (p .103).

Anne-Catherine Wagner cite l’exemple, très parlant, des rencontres annuelles organisées au sein des entreprises multinationales entre les élites dirigeantes et les représentants des salariés : « face à tous les ressorts de l’intégration transnationale des équipes des dirigeants, en contact régulier les uns avec les autres, parlant la même langue, passés par les mêmes business schools et unis dans la défense de la stratégie “globale” de l’entreprise, les principes de division, de dispersion, et de dépossession internationale des représentants des salariés des différents pays apparaissent avec acuité » (p. 71).

Finalement, malgré les « boîtes noires » mentionnées, l’ouvrage d’Anne-Catherine Wagner a le grand mérite de replacer l’humain, ses réseaux et les rapports de force qui caractérisent notre existence sociale au cœur d’un processus, la mondialisation, trop souvent considéré comme étant dirigé par des logiques « purement » économiques.

Anne-Catherine Wagner, Les classes sociales dans la mondialisation[1], Paris, Découverte[2], 2007.

Endnotes:
  1. Les classes sociales dans la mondialisation: http://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index.php
  2. Découverte: http://www.editionsladecouverte.fr/

Abstract

En signant l’ouvrage « Les classes sociales dans la mondialisation », Anne-Catherine Wagner montre une fois de plus sa grande capacité de synthèse. Résumer en une centaine de pages le débat autour de deux notions centrales des sciences sociales contemporaines n’était pas un pari gagné d’avance. L’ouvrage est bien rédigé, clair et concis, sans « ...

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