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Serendipity.

L’aménagement écologique de la ville, une science et un art.

Richard T. T. Forman, Urban Regions. Ecology and Planning beyond the City, 2008.

Image1Richard T. T. Forman, professeur d’advanced environmental studies dans le domaine de l’écologie du paysage à Harvard, a reçu une première formation dans le domaine de l’écologie forestière. Dès 1976, il se lance dans l’étude de l’effet de la taille des « tâches d’habitat végétalisé » sur la diversité des espèces ; il teste son idée à partir des bois dans un milieu de champs cultivés. Ces travaux galvanisent l’idée d’écologie du paysage qui, grossièrement, est une écologie « vue d’avion ». Il publie très vite, avec quelques collègues, des ouvrages fondateurs. Landscape Ecology, écrit en 1986 avec Michel Godron, est la première synthèse d’écologie du paysage moderne, dans laquelle les auteurs élaborent le modèle d’une complexité paysagère qui comprendrait « tâches d’habitat — corridors écologiques — matrice ». En 1995 il publie un ouvrage définitif sur le sujet : Land Mosaics. The Ecology of Landscapes and Regions. Il a travaillé également dans le même esprit sur le thème de l’écologie des routes : Road Ecology. Science and Solutions (2003, ouvrage collectif). Plus récemment, il a développé des travaux sur le thème de l’aménagement écologique des régions urbaines, notamment à partir du projet ambitieux réalisé dans la région de Barcelone, en Espagne, qui a mis en évidence l’importance des systèmes naturels et leur utilisation dans une région urbaine. Le présent ouvrage, Urban Regions. Ecology and Planning Beyond the City, outre ces fondations, propose une vision riche de l’aménagement écologique d’une région urbaine. L’auteur y tire le meilleur d’une analyse de trente-huit régions urbaines distribuées également dans le monde avant d’élaborer quelques principes d’aménagement.

L’ouvrage lui-même se présente comme un manuel structuré de douze chapitres associant les thématiques écologiques à l’échelle de la région urbaine aux problématiques en matière d’aménagement. Mais qu’est-ce qu’une « région urbaine » et qu’est-ce que « l’écologie du paysage », se demande l’auteur dans le premier chapitre ? C’est alors qu’il nous rappelle quelques fondamentaux. Premièrement, il nous explique que la région est un cadre d’investigation et d’intervention, qu’elle ne consiste pas seulement en la région administrative, mais qu’il s’agit bien de penser la région naturelle, d’où une référence au biorégionalisme. Le biorégionalisme se définit comme un système politique, culturel et environnementaliste qui se base sur une conception géographique de l’identité locale et une conception politique des délimitations géographiques. Ainsi les bassins versants peuvent-ils être des cadres naturels de l’identité politique. La biorégion est donc également une notion déterminante de la mise en relation des dimensions biophysiques et culturelles de la région. Pour l’auteur plus spécifiquement, le biorégionalisme fait intervenir aussi bien le terrain géographique que le terrain de la conscience des populations locales. À sa différence, le concept d’écorégion, plus naturaliste, concerne la question des concentrations spatiales de biodiversité dans une région. Deuxièmement, l’auteur nous montre que l’écologie du paysage a permis de spatialiser l’écologie et de lui donner les concepts opératoires pour intervenir dans le débat de l’aménagement. Rappelons brièvement ce qu’est l’écologie du paysage. Avec Alexandre de Humboldt débute l’analyse géographique des paysages en 1805, étude complétée ultérieurement par les écologues ; dès 1939, Carl Troll initie l’écologie du paysage. Cette discipline vise à concilier une analyse spatiale et une appréhension fonctionnelle des organisations naturelles. On s’intéresse alors aux modalités de dispersion des espèces dans des paysages de plus en plus fragmentés, et l’écologie intègre enfin les résultats des activités de l’homme (Forman et Godron, 1986 ; Baudry et Burel, 1999). Plus récemment, des synthèses opérées dans le champ esthétique (Carlson et Berleant, 2004) permettent d’expliquer le renouvellement de l’expérience esthétique du paysage incluant l’écologie (Fel, 2008). L’écologie du paysage intègre donc les questions de variation spatiale (la composition des espaces, leur structuration et leur qualité). Elle intègre également les activités humaines comme constructrices et créatrices de nouveaux milieux. Les échelles et les hiérarchies y jouent alors un rôle dans la détermination de leur contribution. Mais cette promesse ne va pas jusqu’à inclure pleinement les relations de l’homme à son milieu comprises comme étant créatrices et productrices de nouvelles questions écologiques (il suffit de penser au rôle des citadins dans l’adaptation de certaines espèces végétales et animales en ville).

Dans le deuxième chapitre, Forman entre dans le vif du débat de l’aménagement : comment doit-on aménager et de quoi faut-il tenir compte ? Il définit les rôles de l’aménagement, de la gestion foncière, des sites de loisir, etc. Il insiste ensuite sur les questions de conservation des terres dites naturelles et de l’aménagement intra-urbain. Le troisième chapitre traite de l’économie d’une région urbaine, et notamment de l’écologie économique et des questions socioculturelles. Les relations sociales semblent moins importantes à l’auteur que les éléments d’une culture pour comprendre l’organisation écologico-spatiale d’une région urbaine. Le quatrième chapitre traite des éléments du système naturel et des espaces verts plus ou moins structurants à l’échelle de la région. Qu’il s’agisse de l’eau, de l’air, des sols ou des polluants, tous ces éléments sont abordés.

Le cinquième chapitre parle du choix des trente-huit régions urbaines (incluant Londres, Chicago, Ottawa, Brasilia, le Caire, Beijing, Bangkok, Canberra, Barcelone…) ayant été analysées plus finement et fait l’objet de cartographies considérables par type et couverture du sol. Le sixième montre quel type d’analyse spatiale on peut faire à partir de ces cartes afin de déterminer quelles places mesurées prennent la nature, l’eau et la nourriture. Le septième chapitre fait de même en ce qui concerne les systèmes bâtis, les zones bâties. Le huitième porte sur les modèles d’urbanisation et évalue les différentes options. Des modèles différents d’urbanisation sont estimés dans une optique sociale et naturaliste, et les plus intéressants sont mis en avant comme pouvant contribuer au développement durable. Le neuvième chapitre donne les principes de base pour une mosaïque paysagère qui prendrait en compte les différents paramètres. Le dixième concerne uniquement le travail réalisé dans la région de Barcelone et, dès lors, en restitue la chair, c’est-à-dire les rapports de pouvoirs et intérêts en présence qui gouvernent la mise en place de tels plans. Les onzième et douzième chapitres sont des chapitres de synthèse restituant ce travail méthodologique dans le cadre de grands principes de régulation des territoires, en particulier la durabilité.

S’il est incontestable que les systèmes naturels et construits ainsi que les usages qui en sont fait sont essentiels au fonctionnement des régions urbaines, leur étude relève dans l’ouvrage d’une approche avant tout spatiale qui mêle aménagement, socio-économie et science écologique, mais d’un point de vue plutôt surplombant. En outre, l’ouvrage est un manuel à la rédaction plus pédagogique que problématique. Il faut donc le lire en tant quel tel, et l’on y verra alors un précieux outil pour l’aménagement urbain.

Richard T. T. Forman, Urban Regions. Ecology and Planning beyond the City, New York, Cambridge University Press, 2008.

Abstract

Richard T. T. Forman, professeur d’advanced environmental studies dans le domaine de l’écologie du paysage à Harvard, a reçu une première formation dans le domaine de l’écologie forestière. Dès 1976, il se lance dans l’étude de l’effet de la taille des « tâches d’habitat végétalisé » sur la diversité des espèces ; il teste son ...

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